Ria Étienne, Belge engagée au Togo depuis 1999, a témoigné de son parcours de missionnaire lors du 6e Congrès international de Fondacio, organisé début mai 2023, au centre de Sichem, près de Lomé. De son enfance difficile au métier d’infirmière dans un hôpital belge, puis à la permanence au sein de Fondacio en Afrique, cette septuagénaire discrète et résiliente nous livre un témoignage humble et percutant.
Portrait
Ria Étienne a grandi en Belgique, dans une famille chrétienne. Elle est la troisième d’une fratrie de huit enfants. « Mon enfance n’a pas toujours été rose », a-t-elle partagé aux participants du 6e Congrès international de Fondacio, au Togo, mardi 2 mai 2023. « J’ai été placée en internat à l’âge de deux ans et demi, jusqu’à mes 6 ans, avec l’un de mes frères. A mon retour dans ma famille, je me suis beaucoup occupée des autres car j’avais peur de retourner à l’internat. »
Un 6e Congrès d’immersion et de collaboration
Après des études d’infirmière, elle a partagé le quotidien de divers services à l’hôpital, pendant vingt-sept ans, dont celui des urgences, « que j’aimais beaucoup ». Elle a rejoint le service des soins palliatifs au moment où elle s’occupait particulièrement de son père, atteint d’un cancer. « Ça a été une grande perte quand il est décédé. J’avais un lien spécial avec lui. A cette période, je n’allais plus à l’église. »
« Regarde, je suis là »
Ria décide de partir en Tunisie pendant trois mois pour aider dans un hôpital. C’est là qu’elle fait la rencontre d’un berger, avec son troupeau. Il porte alors sur elle « un regard tendre. Je me suis effondrée, c’était comme voir le visage de Jésus me disant : « Regarde, je suis là ». Et à travers lui, c’était le regard de mon père… Je sentais le Seigneur à mes côtés. » A son retour en Europe, dès 1981, la jeune femme approfondit ce lien par le biais de retraites et formations. « Ça m’a aidée à traverser les difficultés de la vie. »
Quelques années plus tard, en 1988, elle renoue avec la dimension spirituelle en découvrant Fondacio. « Fondacio m’a appris à marcher à la suite de Jésus tous les jours. En 1990, j’ai participé au forum de l’association au Togo, pour fêter ses dix ans de présence dans le pays. J’ai visité le Burkina Faso et le Bénin. Je suis revenue en Belgique enthousiaste et heureuse de reprendre mon travail aux soins palliatifs. » Quelques mois plus tard, l’ancien président de Fondacio, Gérard Testard, l’appelle à la permanence au Togo.
« L’appel du Seigneur était plus fort »
« Le 7 octobre 1998, j’ai reçu un « oui » au fond de moi », se souvient Ria. « Je suis partie pendant un mois, en janvier 1999, pour vérifier ce oui. Cela a été un mois très difficile, mais aussi riche en expériences. Mon oui intérieur restait. » Après un autre mois pour vérifier cet appel, en août 1999, Ria s’installe définitivement le 1er novembre 1999 au Togo. « J’ai tout lâché : le confort, la famille, le travail, le salaire, les amis… ce n’était pas simple. La première année a été très difficile, c’était un combat constant. »
Puis, deux mois seulement après son arrivée, le 7 janvier 2000, sa maison est cambriolée. Malgré le choc, Ria fait le choix de rester « car l’appel du Seigneur était plus fort que ce que je venais de vivre. Le nombre de personnes qui sont parties avec moi au Togo, pas physiquement mais mentalement, m’a surpris. Je peux toujours compter sur eux : j’avais autour de 40 personnes qui m’aidaient financièrement. » Les premières années, Ria travaille également pour le Bénin et le Burkina Faso.
Osons !
Aujourd’hui, à l’âge de 72 ans, elle ne compte plus le nombre de projets portés, ou de jeunes aidés. « Je suis toujours garante des dons qui viennent de la Belgique, tout doit être transparent. » Il y a un peu plus de dix ans, Ria a accueilli « une grande surprise : la venue de Christian, un enfant de 2 ans et demi abandonné et placé chez moi, que j’ai adopté. Aujourd’hui, il a 16 ans. » Tout n’a pas toujours été simple. La plus grande difficulté à surmonter reste pour elle la différence de culture : « On est souvent confrontés à la souffrance que les Blancs ont faite, ou continuent à faire. »
Aussi, la langue ; la notion du temps, d’être à l’heure ; le fait d’être une femme seule pour prendre des décisions importantes ; de vivre à distance, manquer les grands rendez-vous familiaux… « J’essaie de m’adapter. Dès le début, le Seigneur a pris soin de moi, m’a guidée, encouragée, soutenue. Il a mis des personnes sur ma route pour m’aider à vivre dans ce pays si différent de la Belgique. Je suis satisfaite de la réussite des projets, de voir des personnes heureuses. Je me sens vraiment un maillon entre Noirs et Blancs, entre riches et pauvres. Je suis heureuse dans ma mission. »
Ria conclut : « Merci du fond du cœur pour tous ceux qui m’ont aidée. Je remercie Fondacio qui m’a permis de vivre cette expérience. Je veux vous dire : osez partir, osez écouter et suivre la voie du Seigneur, c’est votre bonheur. »
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